Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Présentation

  • : Campo Stellae (Le champ des Etoiles)
  • : Je suis Pèlerine et Citoyenne d'un monde que je parcours en tous sens depuis des années. Par mes récits, croquis ou aquarelles, fictions, photos, carnets de voyages, je laisse ici quelques traces des mondes réels ou imaginaires que je traverse...
  • Contact

Vers Compostelle

Pour tout savoir sur
le Chemin de COMPOSTELLE,
cliquez sur le bouton :

 

 



pour suivre mon cheminement,
par le "CAMINO FRANCES" 
jour après jour,
choisissez les étapes
dans la liste ci-dessous :

Le 1er jour :
Monfort/Habas
Le 2ème jour :
Habas/Sauveterre
Le 3ème jour :
Sauveterre/ Saint-Palais
Le 4ème jour :
Saint-Palais/Ostabat
Le 5ème jour :
Ostabat
Le 6ème jour :
Ostabat/Bussunarits
Le 7ème jour :
Bussunarits/St-J-Pied-de-Port
Le 8ème jour :
St-Jean-Pied-de-Port/Hunto
Le 9ème jour :
Hunto/Roncevaux
Le10ème :
Roncesvalles/Viscaret
Le 11ème jour :
Viscaret/Zubiri
Le 12ème jour :
Zubiri/Pamplona
Le 13ème jour :
Pamplona/Uterga
Le 14ème jour :
Uterga/Lorca
Le 15ème jour :
Lorca/Estella
Le 16ème jour :
Estella/Villamayor
Le 17ème jour :
Villamayor/Los Arcos
Le 18ème jour :
Los Arcos/Viana
Le 19ème jour :
Viana/Navarrete
Le 20ème jour :
Navarrete/Najera
Le 21ème jour :
Najera/Santo Domingo
Le 22ème jour :
Santo Domingo/Belorado
Le 23ème jour :
Belorado/S-Juan-de-Ortega
Le 24ème jour :
S-Juan-de-Ortega/Burgos
Le 25ème jour :
Burgos/Hornillos
Le 26ème jour :
Hornillos/Castrojeriz
Le 27ème jour :
Castrojeriz/Boadilla
Le 28ème jour :
Boadilla/Carrion
Le 29ème jour :
Carrion/Calzadilla de la C.
Le 30ème jour :
Calzadilla/Sahagun
Le 31ème jour :
Sahagun/Calzadilla de los H.
Le 32ème jour :
Calzadilla/Mansillas
Le 33ème jour :
Mansillas/Leon
Le 34ème jour :
Leon/Villar de Mazarife
Le 35ème jour :
Villar de M./Hospital de Orbigo
Le 36ème jour :
Hospital de Orbigo
Le 37ème jour :
Hospital de Orbigo/Astorga
Le 38ème jour :
Astorga/Rabanal
Le 39ème jour :
Rabanal/Riego de Ambros
Le 40ème jour :
Riego/Cacabellos
Le 41ème jour :
Cacabellos/Vega de Valcarce
Le 42ème jour :
Vega/Hospital da Condesa
Le 43ème jour :
Hospital da Condesa/Triacastela
Le 44ème jour :
Triacastela/Sarria
Le 45ème jour :
Sarria/Portomarin
Le 46ème jour :
Portomarin/Palas de Rei
Le 47ème jour :
Palas de Rei/Ribadiso de Baixa
Le 48ème jour :
Ribadiso de Baixa/Santa Irene
Le 49ème jour :
Santa Irene/Santiago
Le 49ème jour (suite) :
Santiago de Compostelle
Le 50ème jour :
SANTIAGO DE COMPOSTELLA
Le 51ème jour :
Santiago/Negrera
Le 52ème jour :
Negrera/Olveiroa
Le 53ème jour :
Olveiroa/Finisterra

 

Et vous ?? d'où venez-vous ??

 

Locations of visitors to this page

 
Vers Compostelle
par la voie d'Arles
 

(récit à venir...) 

Vers Compostelle
par le "CAMINO DEL NORTE"

 (récit à venir...)  


Découvrez Dominique Bouvier!

Recherche

Les Mousquetaires de l'Art

Archives

5 juillet 2011 2 05 /07 /juillet /2011 17:59

J'ai "rencontré" l'Afrique en 1967, l'Afrique du Nord, la Tunisie, mais déjà un continent qui me parlait... qui me parlait. Et puis j'ai découvert aussi l'Afrique noire, celle de nos ancêtres dirait Lucy, celle du passé de tous les hommes. Et depuis ce jour là, c'était le Gabon, c'était en 1985, l'Afrique m'a innoculé son virus, celui dont on ne guérit pas, celui qui fera de nous, si l'on s'éloigne d'elle trop longtemps... un rénégat.

 

J'ai quitté l'Afrique voilà déjà 4 ans, et l'Afrique me manque. Me manquent l'air putride des marchés de Lagos au Nigéria, le sable brûlant des plages de Saint-Denis face à Libreville au Gabon, le clapotis de l'eau sous les planchers lacustres de Ganvié au Bénin, les pit-pit des chauves-souris quand la nuit tombait sur Lomé au Togo... J'ai vécu des moments douloureux durant les mois qui ont précédé mon départ de Luanda, et pourtant l'Angola me manque aussi.

 

 

J'ai des fourmis dans les jambes, il faut que je reparte vite...

Partager cet article
Repost0
10 octobre 2009 6 10 /10 /octobre /2009 05:10
J'ai vécu et voyagé dans de nombreux pays en Afrique : Au Gabon, au Nigéria, au Togo, au Bénin, en Afrique du Sud, en Namibie... et en ANGOLA.

Je vous présente ici quelques images qui me semblent bien refléter la vie angolaise, celle de tous les jours et surtout celle des humbles...





Optez pour le plein écran en cliquant en bas à droite du diaporama.





A cette époque (de 2003 à 2007) je ne disposais pas des appareils photos sophistiqués (Canon EOS 350 D et 50 D) que j'utilise aujourd'hui. La qualité des clichés n'est donc pas géniale, mais ce n'est pas ce que je voudrais que vous en reteniez après avoir visionné cette série...

J'aimerais que certains "détails" vous interpellent,

j'aimerais que vous ayiez des questions à me poser (auxquelles bien sûr je répondrai volontiers),

j'aimerais que vous ayiez, pour les voir, un oeil complice et une certaine empathie...

C'est donc volontairement que je n'ai pas mis de légendes sur les clichés, mais je vous donnerai toutes les explications que vous me demanderez...


Partager cet article
Repost0
5 mars 2005 6 05 /03 /mars /2005 01:05

EPAVES

Sur la plage de Santiago, Luanda - ANGOLA

Ils gisent sur le sable...

 

comme de grands corps blessés,

 




ballotés par les flots,



pillés, rouillés, oubliés,



... de leurs tôles rouillées



sortent parfois des cris
d'oiseaux blessés...

Partager cet article
Repost0
3 mars 2005 4 03 /03 /mars /2005 01:13

C’est l’éternelle question du verre à moitié vide ou du verre à moitié plein, deux regards contradictoires sur un même monde, deux visions opposées d’une même réalité, paradoxales dans leur gémellité…

 

Flambloyants et Cacimbo

 

 

Les Flamboyants

 

de MG à BD

Très chère BD,

Lors de mon dernier passage en France, je t'avais promis de longues lettres. Et j'avais aussi promis de faire l'effort de glisser, dans chacune d'elles, un peu de l'air du temps qu'il fait ici à Luanda,  si loin de vous mais si près du soleil. On imagine l'ailleurs toujours plus beau que l'endroit d'où l'on est… un peu comme sur ces cartes postales qui véhiculent des clichés d'exotisme, de  cocotiers, de longues plages de sable fin où une douce brise ferait flotter les cheveux sur des épaules nues et dorées, les pieds se jouant du clapotis des vagues qui viendraient mourir doucement sur la grève au coucher du soleil…

Toutes ces images bien sûr on peut les glaner ça et là à la sortie de Luanda entre Palmeirinhas et la pointe de Mussolo.

 

 

On y ajoute aussi selon l'humeur la majesté des grands baobabs qui jalonnent la route de Corimba entre océan et savane, leurs troncs énormes enchassés dans l'argile rouge et leurs bras immenses et dénudés tendus en un appel silencieux. Implorent-ils le ciel où les dieux se cachent, honteux de la misère qu'ils laissent corrompre les coeurs et les corps de leur pauvre peuple ?

Si l'on poursuit sa route vers le Sud, on apercevra, tache blanche contrastant sur un fond de pur ciel bleu, la maison des esclaves, fichée sur son piton rocheux, bravant les vents et les embruns, avec fierté, immuable vestige d'un temps où l'or noir se négociait à la blancheur des dents et à la couleur de la peau.

Lorsqu'on quitte Luanda, il suffit de quelques dizaines de kilomètres pour retrouver l'air pur, l'espace, les grands horizons atlantiques ou sylvestres...et les couleurs !... Ah, les couleurs de l'Afrique !...

Non non, l'Afrique n'est pas noire, c'est le plus coloré des continents. Ici la terre est rouge, le ciel est tantôt rose ou mordoré, tantôt bleu topaze ou pourpre, le tronc des arbres est d'argent et luit sous le soleil ou la pluie comme une carapace métallique, la forêt scintille de toutes les goutelettes capturées par des feuilles émeraude, bleu cyan ou vert céladon, les acacias sont flamboyants, les chiens sont jaunes et les robes des femmes kaléidoscopes de tons chatoyants, les lèvres et les langues sont pêches ou fruits rouges et les dents perles blanches, et si les yeux sont noirs c'est pour regarder la vie sans détour.

Je t'avais promis des images et des senteurs, alors poursuivons notre route au Sud vers l'embouchure du fleuve Kuanza. La ville est loin, la savane toute proche, l'air humide sent l'iode mais il y flotte aussi des parfums plus sauvages. Le fleuve se perd en méandres tentaculaires, jusqu'à plonger dans l'océan, les charognes y restent prisonnières et s'y décomposent lentement. L'air est lourd de vie et de mort.

Sur la plage de Cabo Ledo, trois pêcheurs s'activent à rentrer leurs filets. Perchées sur la proue de leurs barques, quelques aigrettes blanches attendent, stoïques, que les pêcheurs libèrent les poissons restés prisonniers de leurs mailles. Aux senteurs iodées s'ajoutent celles d'un feu de bois que les pêcheurs ont allumés près de leurs cases. Le soir tombe, il faut rentrer.

Je t'emmènerai encore pour d'autres découvertes pleines d'images, de couleurs et d'odeurs.

J'espère que cette promenade angolaise t'aura quelque peu " oxygéné " l'esprit, j'ai pris moi aussi plaisir à la ballade en ta compagnie, elle m'a rappelé celles que nous faisions ensemble, il n'y a pas si longtemps, dans la forêt landaise.

Toutes mes pensées vont vers vous, ne m'oubliez pas.

Je t'embrasse affectueusement

MG



Cacimbo

 

 

De MG à BD

Très chère BD,

Je n'oublie pas la promesse que je t'avais faite lors de mon dernier passage en France : de longues lettres comme un journal de bord tenu au fil des jours et qui te permettrait de partager mes découvertes.

Mais je ne sais quelle lassitude m'a saisie depuis quelques semaines. Comme si le souffle me manquait, comme si le coeur n'y était plus. L'Afrique me ment. Ou bien elle a changée sans que je m'en aperçoive. Je disais il y a peu de temps que lorsqu'on a vécu en Afrique, on ne peut en rester longtemps éloigné sans en ressentir le manque. Aussi, après dix ans d'absence, je me réjouissais d'être amenée à y vivre encore quelques années. Bien sûr l'Angola était une nouveauté, mais après le Gabon, le Togo, le Bénin et le Nigéria, j'imaginais trouver une Afrique autre mais toujours même : la vie grouillante, mais la vie, la pauvreté, mais aussi la solidarité, une certaine indolence, mais encore, la sagesse. au lieu de quoi je ne vois ici, dans ce pays ivre de vingt ans de guerre, que la crasse la plus profonde y compris dans les coeurs.

Qui te dira le poids de l'univers carcéral dans lequel je vis.  Deux bâtiments face à face, véritables bunkers gardés nuit et jour par des sentinelles armées de mitraillettes où j'occupe au 8ème étage, un appartement sous surveillance vidéo. Si l'on veut sortir de Luanda, il faut être en convoi de plus de trois voitures sous escorte armée. Cette recommandation est également valable pour les déplacements de nuit lorsque tu es invité chez des amis. Au début cela peut paraître excitant, mais devient vite pesant.

Ces précautions surprenantes sont pourtant nécessaires. La pauvreté est telle ici que toute apparence de richesse devient compromettante.

Paradoxe d'un pays riche des revenus du Pétrole et dont le peuple meurt de faim, oublié par des gouvernants surtout préoccupés de leur enrichissement personnel.

La ville de Luanda ressemble à un grand dépôtoir, les poètes l'ont dit  « innocemment cruelle », moi je la vois surtout cruelle.

Cruelle pour toute une génération sacrifiée qui a vécu les vingts dernières années sans aucune éducation, aucune culture, aucune structure, sans aucun avenir.

Cruelle pour ces femmes que je vois chaque jour, un enfant sur chaque hanche, un autre dans le dos, le ventre gros d'une nouvelle grossesse, vendant dans les fumées de pots d'échappement, quelques fruits ou légumes pour améliorer le quotidien.

Cruelle pour ces hommes qui n'ont connu que la guerre et dont la violence est le quotidien, à la recherche d'une dignité que seul le travail pourrait leur donner mais qu'ils sont incapables d'assumer.

Cruelle pour ces enfants de la guerre qui ont perdu un bras, une jambe, ou les deux. A quoi rêve cet adolescent, visage tourné vers le ciel,  yeux aveugles qui mendie quelques kuanzas ?

Ah douleur de l'Afrique pillée, écartelée, exsangue !. Douleur de tout un peuple à la recherche de son identité.

Je ne sais si pour l'Angola viendra le jour d'une aube nouvelle et prometteuse, pour l'heure je ne vois que désordre, vols, crimes et pourriture.

La saison des fruits viendra sans doute après l'hiver, comme Cacimbo chasse la saison des pluies, je sais voir aussi le coin de ciel bleu parmi tous ces nuages, je sais voir les visages avenants, et entendre les voix qui prédisent des lendemains meilleurs. L'Afrique est parfois belle, mais sa beauté ne peut faire oublier la souffrance des peuples qui y vivent.

Nos promenades dans la forêt landaise me manquent énormément, la chaleur de l'amitié me manque aussi. Je pense à vous souvent, mes amis restés en France, vous me manquez comme me manque cruellement un peu d'ordre et de beauté..

 Ne m'oubliez pas,

Je t'embrasse affectueusement,  

 

MG

alias

 

Martine

Pèlerine et Citoyenne du Monde

 

 

Partager cet article
Repost0
2 mars 2005 3 02 /03 /mars /2005 15:59

 

 

Luanda, 24 Octobre 2003, 7 h 30
 
Regards sur la ville,
 
Du haut des huit étages d’Impala je peux apercevoir la mer… Mon horizon s’étend, à gauche, de la pointe Sud d’Ilha, au nord-ouest de la ville, jusqu’aux Bairros de Nelito Soares, Marçal et Operàrio, à l’extrême Est… vers le Port.

 

Quartier résidentiel de Maianga - Luanda, Angola

 

 
L’air encore frais du petit matin s’est chargé d’effluves iodées et, déjà, me parviennent d’autres odeurs plus folkloriques en provenance des « musséqués ». C’est d’abord par les odeurs que l’on prend contact avec l’Afrique.
 
A ma droite, surplombant les quartiers populaires, les collines de Boavista et leur quota de résidences huppées abritent une majorité de diplomates ou gens d’affaires très fortunés… Imposantes maisons coloniales aux murs blancs ou vivement colorés et petits jardins clos de hauts murs croulant sous une avalanche de jasmin carmin ou d’odorants chèvres-feuilles lusithaniens… restent les rares vestiges d’une présence portugaise de plus de cinq siècles.
 
Mon regard flotte sur la ville qui peu à peu s’agite et revient vers l’avenue centrale d’où monte crescendo comme un bourdonnement, un brouhaha d’abord diffus puis de plus en plus envahissant.
 
Au pied du large escalier blanc qui débouche sur Avenida Marian Nguabi s’installent déjà les petits commerces de survie. Sur un escabeau branlant s’offrent à la convoitise du passant : lunettes de luxe, tapis, ventilateurs ou plantes exotiques…. De la denrée introuvable à l’objet passe-partout le négoce de la rue est souvent moins aléatoire que le commerce officiel.
 
A présent, du quartier de Mayanga au Largo Amilcar Cabral un flot continu de véhicules bruyants descend vers la Marginale. Il est bientôt 8 heures.
 
Je quitte le balcon jusqu’où monte une poussière rouge et dense qui s’infiltre partout. Sur la table de la cuisine, au passage, j’attrape mon bol de café qui refroidit, traverse l’appartement et pose le pied sur le carrelage encore frais du balcon sud donnant sur les quartiers d’Alvalade.
 
Mes fenêtres donnent sur une petite école angolaise dont la cour est encore vide. Seul un enfant désoeuvré, assis à même le sol au pied d’un grand Albizia, joue avec quelques cailloux et une radicelle…. Il est bientôt rejoint par un trio espiègle et bavard. Sous mes yeux la cour se remplit peu à peu et l’air vibre de cris d’enfants excités, vindicatifs ou joyeux…. jusqu’à l’arrivée du maître vêtu avec beaucoup de sobriété d’un pantalon sans doute noir sous la poussière et d’une chemise blanche. Le silence se fait aussitôt, les enfants pénètrent dans la salle en rangs parfaits, la cour se vide.
 
Sur le trottoir, en face, une femme en boubou flamboyant porte un enfant sur sa hanche, le maintient de sa main gauche, tandis que de la droite elle assure l’équilibre d’une énorme bassine de plastique rouge pleine de légumes et de fruits, elle évite de justesse l’homme, couché sur un carton, à moitié dévêtu, qui dort sans égard pour tout ce qui s’agite autour de lui… Hier soir, je l’ai aperçu, saoûl comme un polonais, déambuler dans la rue, les vêtements pleins de graisse, hirsute, incohérent, le regard fou…. Je l’ai entendu hurler aux étoiles et insulter ses dieux…
 
Le ciel s’obscurcit de façon inattendue. Cacimbo, la saison sèche, est déjà loin. Le vent charrie de gros nuages lourds, poivre noir sur un ciel aubergine, les premières grosses gouttes tombent comme pour rythmer les 8 coups qui proviennent de la Sagrada Familia.
 
Il est 8 heures, j’ai bu mon café mais avant de refermer ma fenêtre je goûte ce moment de silence exquis qui précède toujours les orages.
 
 
Martine Réau-Gensollen
 
 
 
Mots imposés :
 
Folklorique
Contact
Quota
Majorité
Avalanche
Escabeau
Passe-partout
Radicelle
Bavard
Sobriété
Hanche
Polonais
Graisse
Hurler
Poivre
Exquis
 
 
L’Atelier d’Ecriture, proposition 139 Octobre 2003
Partager cet article
Repost0
1 mars 2005 2 01 /03 /mars /2005 15:53

" PLUIE TROPICALE"

(Luanda, Mars 2005)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La voiture traverse le Bairro Popular en cahotant... la pluie tombe, d'abord en fines gouttelettes qui font écran sur le pare-brise, puis, après quelques minutes, de grosses et lourdes gouttes noient l'espace et rendent moins praticable encore la chaussée déjà criblée de trous d'obus. Ils se remplissent rapidement et deviennent de véritables pièges dont il est difficile d'estimer la profondeur... Comme si elle avait attendu la pluie pour s'affairer dehors, la foule se presse et s'agite de part et d'autre de la ruelle, il faut alors manoeuvrer serré pour éviter les trous et les piétons inconscients...

 

 

Présence insolite au milieu du passage, un haut monticule de latérite rouge barre la route : à son sommet, un chien jaune assis, impassible, domine la situation et malgré la pluie qui coule sur son pelage, sage et stoïque, il porte un regard désabusé sur cette agitation humaine. Au prix d'une manoeuvre acrobatique et périlleuse, la voiture contourne l'obstacle et continue sur sa lancée. Le chien n'a pas bougé...

 

 

Au milieu des gerbes d'eau soulevées par le véhicule, surgit une adolescente. Ses vêtements trempés sont plaqués sur son corps mince et luisant, la pluie ne semble pas la gêner... Sur son visage ébène un éclatant et merveillleux sourire : elle s'amuse de la situation, court pieds nus entre les voitures, caracole comme un cheval sauvage à qui l'on aurait soudain rendu la liberté, elle lève ses bras graciles vers le ciel, laisse couler l'eau sur son corps, tourne et virevolte, ses hanches battent la cadence d'une musique exotique imaginaire, son regard dit toute la jouissance qu'elle éprouve, d'être là, sous la pluie, libre et heureuse ...

 

 

La voiture a ralenti son allure, elle doit maintenant rouler au pas... sur une centaine de mètres la rue n'est plus qu'un cours d'eaux boueuses où flottent quelques détritus informes. Au bord de cet océan, deux hommes négocient un marché, l'un porte un costume trois pièces, chaussures de cuir, attaché-case, l'autre ne porte qu'un short long, torse et jambes nus, il se baisse et prend le premier sur son dos, à califourchon, passe ses bras musclés sous les genoux de l'élégant, traverse, eau à mi-jambes, et dans un grand éclat de rire décharge son fardeau au sec, moyennant quelques kwenzas...

 

 

Bien que les vitres fermées de la voiture atténuent les bruits de la rue,  les rythmes afro-lusithaniens pénètrent jusqu'au fond des entrailles, les musiques, différentes, s'enchaînent par vagues successives, au gré de la progression du véhicule jusqu'à ne faire qu'une seule et même musique, un seul tempo, comme les battements sourds du coeur de l'Afrique.

 

 

Pour protéger sa coiffure de la pluie, une femme très âgée, visage buriné, yeux délavés, madonne aux cheveux blancs crépus serrés dans un sac plastique publicitaire, a noué superbement son foulard improvisé. La marque "JUMBO " en grosses lettres rouges, adroitement disposée, forme comme une énorme fleur au-dessus de l'oreille, d'où pend lascive et incongrue une longue boucle d'or. Le buste droit, le regard altier, elle attend, assise sous un auvent de fortune, que la pluie cesse, que le taxi-brousse arrive, ou que le temps s'écoule...

 

 

Après les ruelles animées du quartier commerçant, la voiture pénètre maintenant dans la zone d'habitation du Mousséqué, où les cases, plus espacées, ménagent quelques aires de jeu ou de rencontre parfois flanquées d'un immense baobab dont la vocation d'arbre à palabres paraît évidente. Ici, la terre absorbe encore les flots célestes et les restitue en nappes de vapeur chaude qui flottent à quelques centimètres du sol. Une femme dispose sa lessive sur une corde tendue : ainsi le linge, rincé à l'eau de pluie, sera plus doux .

 

 

Au loin, on distingue déjà les lumières de la ville, on s'en approche en rejoignant par le Largo  1er  Maio les boulevards bitumés. La pluie tombe toujours, moins drue... Les essuie-glaces battent la mesure comme un métronome bien réglé, et chaque va-et-vient des balais de caoutchouc tente d'effacer le souvenir si proche de ces instantanés fragiles, visages capturés, instants de vie volés, à travers une vitre mouillée ! .

 

 

 

 

 

 

Martine,

Pèlerine et Citoyenne du Monde 

Luanda, à l'autre bout du monde

 

 

Partager cet article
Repost0