FUNMILAYO ou
« Le Don des Dieux »
Quatrième partie : L’ annonce faite à Mouremy
Mouremy est à nouveau seule…
Les anciens sont perplexes et avant de convoquer le conseil une nouvelle fois, ils décident d’attendre la fin de la période de deuil.
Un soir, alors que Mouremy va trouver le sommeil, le vent lui rapporte d’étranges paroles…. Elle entend distinctement :
- Nous, dieux des vents, des eaux et de tous lieux de l’Univers, nous avons entendu ta prière et l’avons exaucée.
- Mais tu nous es maintenant redevable d’une vie.Tu enfanteras. Ce sera une fille, elle sera « Orisha », déesse vivante, et montrera le chemin aux gens de ton village, elle sera la voix du peuple Yoruba, peuple élu des dieux, on viendra de toutes les contrées entendre sa parole, elle sera sage et restera vierge, comme toi et tu la nommeras FUNMILAYO, « le don des Dieux », ainsi jamais tu n’oublieras que sa vie ne t’appartient pas.
Lorsqu’elle se réveille, ces paroles flottent encore dans son esprit. A-t-elle rêvé ? Les dieux lui ont-ils vraiment parlé ?
Les anciens et tous les gens du village ne sont pas longs à s’apercevoir que Mouremi va être mère. Et cela semble les satisfaire. Nul besoin à présent de convoquer le conseil des sages. La descendance est assurée. L’enfant peut vivre avec la mère.
Mouremy goûte enfin le statut de femme libre que lui donne son veuvage. Les jours s’écoulent paisibles dans l’attente de celui où viendra au monde son enfant…
Comme les dieux l’ont promis, Mouremy, vierge élue, donne enfin le jour à une fille et comme les dieux l’exigent elle lui donne le nom de Funmilayo (« le Don des Dieux » en langage Yuruba)
Dès son plus jeune âge, Mouremi voit bien que l’enfant est différente, dans son regard d’abord qui semble voir au-delà de tout, dans ses paroles ensuite qui captivent n’importe quel auditoire et qui, d’essence divine, semblent parfois porter ombrage aux vieux sages.
Mouremy sait déjà que l’avenir de son enfant suit la trace édictée par les dieux puissants de l’Univers. Mais c’est de Funmilayo elle-même que vient, quelques années plus tard, la confirmation de l’incroyable destin qui sera le sien.
« Je dois partir sur les chemins, quitter notre village, répandre la Parole qui ouvre les coeurs et les esprits partout où se trouve la vie. Ma tâche sera rude, je le sais, j’irai aussi à la rencontre de mes ennemis… ».
« Un jour mon père me rappellera à lui, lorsque j’aurai accompli ce pourquoi on m’a donné la vie, et ce jour-là, dit-elle, souviens-toi Moumi, ma mère, que ma vie ne t’appartient pas, et ne m’appartient pas non plus ».
Ainsi fit-elle…
Ainsi fût-elle….
Ainsi soit-elle !
Martine Réau-Gensollen
A Luanda, Avril 2004
Ce conte m’a été inspiré doublement par le prénom yuruba de ma fille July-Anna et par la religion Yuruba qui trouve ses origines au Nigéria.
Funmilayo signifie réellement le Don des Dieux… ou le Cadeau du Ciel, comme on voudra… J’ai adopté July lorsqu’elle avait 4 ans. Elle est Yuruba d’origine. Le monde Yuruba c’est à la fois une région localisée à l’Ouest de l’Afrique et plus particulièrement entre l’Ouest du Nigéria et l’Est du Bénin et dont l’épicentre est Oshogbo. Mais c’est aussi une religion qui aujourd’hui compte plus de 20 millions d’adeptes dans le monde. On pourrait dire que mille choses la rapprochent du Christianisme dont elle est probablement cousine… notamment le « mythe » de l’immaculée conception… Il existe aussi, dans la tradition orale Yuruba, une certaine Mouremy dont l’histoire est bien proche de celle de Marie mère de Jésus…
J’ai donc un jour pensé : et si Dieu était noir ? et si Jésus était une femme ???
C’est ainsi que ce conte est né… l’avez-vous aimé ?
La religion Yuruba fera l’objet d’un prochain article…